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Comment gérer le regard des autres

Notre société est largement institutionnalisée. Comme nous le fait remarquer Ivan Illich dans Une société sans école, lorsqu’on pense maladie, on pense hôpitaux, si on pense instruction, c’est le mot école qui nous vient instantanément, protection nationale, armée, etc.

Par conséquent, si nous choisissons de ne pas mettre nos enfants à l’école, nous sortons des sentiers battus, du moule, nous devenons des marginaux et parfois même des irresponsables !

Il est évident que nous nous exposons alors au regard des autres, au jugement.

Et plus nous sommes fragiles par rapport à ça, plus les mots sont virulents et nous touchent profondément.

Les mots qui blessent

Si notre enfant est de nature agitée, s’il est « speed », mais qu’il va à l’école, on lui mettra l’étiquette de « troubles du comportement » ou autre de sorte que l’école est mise hors de cause. Par contre, s’il est instruit en famille, on accusera les parents de ne pas s’en occuper, d’être trop laxistes. On dira qu’il est mal élevé ou encore que c’est un enfant roi : « de toute façon, il a le droit de faire ce qu’il veut ! Ce n’est pas étonnant ! », « regarde, il court partout, et elle ne dit rien ! », « il passe ses journées dehors, pas étonnant qu’il n’arrive pas à se calmer ! »…

Ou encore, lorsqu’on croise des mamans dans le parc et qu’elles nous demandent, innocemment bien sûr : « ça ne lui manque pas les copains ? », « tu n’as pas peur de le priver des meilleurs moments de sa vie ? », « tu n’as pas peur qu’il devienne asocial ? »

Quand la famille ou les amis s’y mettent :

« Et comment vas-tu faire s’il veut retourner à l‘école, ou s’il veut faire des études ? »

« Et s’il n’apprend pas à lire ? »

« Tu comptes le remettre bientôt à l’école ? De toute façon, tu ne peux pas le garder tout le temps à la maison, il va bien falloir qu’il y retourne un jour ! ».

« Vous êtes irresponsables, c’est lui faire prendre le risque qu’il ne réussisse pas, qu’il n’ai jamais son Bac. Il ne pourra pas choisir son métier ! »

« Tu n’as jamais rien fait comme tout le monde ! N’entraîne pas tes enfants là-dedans ! »

Toutes ces choses qu’on nous a fait croire toute notre vie, pour nous convaincre que l’école, c’était pour notre bien, nous reviennent tout à coup en pleine face ! Et ça peut faire vraiment mal. On peut avoir le sentiment de ne pas être compris(e), on peut se sentir vraiment seul(e).

Mais pourquoi ce jugement ?

« Il est bien plus difficile de se juger soi-même que de juger autrui. »

Antoine de St Exupéry

J’adore cette citation qui m’aide à considérer les personnes qui me jugent avec empathie.

En effet, les personnes qui critiquent sont celles qui sont blessées, meurtries, frustrées.

La seule façon qu’elles ont eu d’accepter leur dure réalité a été de se convaincre que c’était la seule possible.

Tout d’abord, tous ces gens ont commencés par être petits ! Et forcément, s’ils jugent, c’est que eux ont été à l’école. Et l’école, ce ne sont pas forcément que des bons souvenirs… Même ceux qui ont été bons élèves et qui assurent avoir bien aimé l’école, se sont forcément un jour senti contrains, par le fait de se lever ou de devoir réviser telle ou telle chose inintéressante ou par le fait de devoir attendre la récréation pour se mettre debout, aller boire…

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Ils ont dû également être stressés par le contrôle du lendemain, les examens trimestriels, les évaluations hebdomadaires, la peur de décevoir ou de passer pour un mauvais élève…

Lors de ma formation de parentalité créative, la formatrice nous a fait faire un petit exercice d’introspection appelé le focusing, sur le thème des apprentissages. En gros, c’était pour faire émerger les émotions liées au souvenir des apprentissages scolaires. Sur tous les adultes présents, pas un seul a ressenti une émotion positive, pourtant il y avait des parents favorables à l’école.

En effet les gens n’ont pas forcément conscience qu’ils se sont résignés. Il en naît une grande frustration. Par conséquent, ils peuvent juger, ou même devenir agressifs.

De plus, ces mêmes personnes sont devenues parents et ont certainement mis leurs enfants à l’école. Du coup, ils ne peuvent pas considérer votre choix comme le bon, car cela reviendrait à dire qu’eux ont fait le mauvais choix. En effet, s’ils sont dans le jugement, c’est que pour eux il n’existe pas plusieurs choix possibles. Ils pensent que seul leurs jugements de valeur sont valides.

Nous faisons tous nos choix en fonction de ce que nous pensons être le mieux pour nos enfants. Certains ne sont pas assez ouverts pour considérer de façon bienveillante le choix des autres…

Un autre aspect pourrait être à l’origine de cette intolérance : la jalousie. Comme je vous le disais dans cet article, le choix d’IEF peut faire évoluer toute la famille vers une vie plus saine, moins stressante, centrée sur le partage, l’écoute de soi…Du coup, ça peut mettre en relief le fait que pour eux, leur vie reste stressante. Il est donc plus simple de se dire qu’on n’a pas tous le choix, que c’est une question de responsabilités, ou que sais-je encore, que de se remettre en cause. L’agression est donc l’arme la plus simple !

Comment y faire face ?

Déjà, je trouve que le fait de savoir pourquoi les gens réagissent de façon agressive ou en jugeant, permet de prendre un peu plus de recul.

Personnellement, plus je suis sûre de moi, de mes choix, moins les gens se permettent de me juger. Si ce n’est plus perçu comme une faiblesse, il y a moins d’emprise possible.

Mon expérience et mes lectures m’ont permis de faire mes choix et me permettent encore aujourd’hui d’en être sûre et de les assumer. Le fait de savoir comment se font les apprentissages me conforte dans mes décisions. Mes ressentis, mes observations sont sans cesse validées par mes lectures, par des témoignages ou encore par la science.

Il semble donc intéressant de se constituer un petit répertoire de phrases clés, incontournables et de quelques références bibliographiques et scientifiques pour réussir à affirmer ses choix avec conviction et ainsi ne plus craindre le jugement des gens.

Je vais essayer de partager avec vous ce petit répertoire, bien qu’il me soit personnel et qu’il corresponde à nos choix, qui sont certainement différents des vôtres.

Répertoire de phrases clés :

Mes enfants n’ont pas eu besoin de moi pour apprendre à marcher ou à parler. Pourtant, ce sont des apprentissages extrêmement complexes. Pourquoi, à partir de trois ans, aurait-il besoin qu’on leur enseigne les choses pour pouvoir les apprendre ?

Mes enfants sont tout le temps au contact de l’écrit : dans la rue, quand on lit des histoires, quand on regarde une recette, lorsqu’on fait des courses… S’ils n’arrivent pas à apprendre à lire, c’est qu’ils n’y seraient pas non plus arrivés à l’école, c’est qu’il y a un problème quelque part. Si c’est le cas, bien sûr que je mettrais des choses en place pour les accompagner. Le fait d’aller à l’école est indépendant du fait de pouvoir apprendre à lire. (Je rappelle que nous sommes en Unschooling et que donc je n’apprendrais pas à lire à mes enfants, ils apprendront seuls. Mon fils a 7 ans et ce n’est toujours pas le moment pour lui…)

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« Nul ne peut être renfermé contre son gré ». Pourquoi est-ce que ça ne s’appliquerait pas aux enfants ?

Est-ce que tu aimerais qu’on te dise : « aujourd’hui tu vas apprendre ce qu’est un vecteur. Tu n’en vois pas l’intérêt, mais ce n’est pas grave. Peut-être que tu le verras un jour. »

Moi je n’accepterais pas de travailler sans être rémunérée, et en plus en faisant quelque chose que je n’ai pas envie de faire. C’est pourtant ce qu’on demande tous les jours aux enfants qui sont à l’école !

Quelle est la notion la plus importante que tu as apprise dans ta vie et dont tu te sers tous les jours ou presque ? L’as tu apprise à l’école ?

Il y en a bien sûr plein d’autres de possible, à vous de trouver celles qui résonnent en vous, celles qui correspondent à votre situation. Vous pouvez également lire l’article « je suis en colère » qui peut vous donner des idées.

Répertoire bibliographique :

La liste est encore une fois non exhaustive et autrement influencée par le fait que nous soyons en unschooling. Où alors est-ce toutes ces lectures qui ont fait que nous soyons en Unschooling ? Un subtil mélange des deux, j’imagine…

Répertoire d’études scientifiques

J’ai déniché une liste d’études scientifiques sur l’instruction en famille. Vous y trouverez certainement celle qui correspond à vos choix. Je ne les ai pas toutes lues, bien sûr. Il vous appartient donc de vérifier leur pertinence.

Un ami m’a fait passer une étude en faveur de l’ Unschooling. Elle est faite sur 200 familles, donc potentiellement intéressante. En tout cas moi je la trouve très parlante. Je pense même en fournir une copie à mon inspecteur ! Voici le PDF.

Il y a bien sûr la conférence dont je vous parle dans cet article : Neurobiologie et éducation : conférence du Prof. Dr. Gerald Hüther
Et de façon générale, les neurosciences ont prouvé que les apprentissages étaient favorisés si les besoins physiologiques des enfants étaient comblés : sommeil, alimentation, élimination, présence d’une figure de rattachement, contact.
Cela montre également que les émotions négatives sont des obstacles à l’apprentissage : le stress, la peur, les humiliations, l’ennui…
Pour compléter vous pouvez lire l’article que j’ai écrit sur les apprentissages.

Carnaval d’articles

Cet article participe à un « carnaval d’articles » lancé par le blog « apprendre-par-le-jeu.com ». C’est un évènement interblogueurs sur le thème de l’instruction en famille. Ça peut ainsi vous permettre de découvrir d’autres blogs ayant participé et écrit sur ce sujet qui vous intéresse. Il vous suffit de cliquer sur ce lien pour accéder aux autres articles.

J’aime bien le blog « apprendre par le jeu » car il permet aux familles d’envisager les apprentissages, même les plus scolaires, d’une façon différente. Ainsi vous trouverez pleins d’idées, notamment dans l’article « l’importance du jeu dans le développement de l’enfant ».

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